Causes et conséquences de la défaite de la Russie dans la guerre de Crimée.

Diplomatie

La défaite de la Russie pendant la guerre de Crimée a eu plusieurs causes. Les causes étaient à la fois diplomatiques et stratégiques. On peut soutenir que les erreurs diplomatiques éclipsent les erreurs stratégiques. Nous les évaluerons tour à tour.

La perception européenne de l’Empire russe au XIXe siècle n’était pas très flatteuse. LEmpire russe était invariablement présenté comme autoritaire, trop peu raffiné pour les subtilités de la diplomatie du XIXe siècle. On pourrait être tenté de rejeter cette image de la Russie comme un cliché. Mais la plupart des tropes ont un noyau de vérité, et malheureusement la Russie navait pas les compétences diplomatiques requises pour la diplomatie européenne du XIXe siècle.

Nicolas I avait commis la majorité de ses erreurs avant même le début de la guerre. La plus grande de ces erreurs a été daliéner tous les alliés potentiels. Si nous voulons découvrir les causes de la défaite de la Russie, nous devons étudier l’incapacité de la Russie à établir de bons rapports avec la Grande-Bretagne. Leur manquement a entraîné la perte de lallié sur lequel ils comptaient.

Le 9 février 1852, la Porte accepta dhonorer la promesse de 1740 que la France possédait une «autorité souveraine» dans le Lieux saints. Ce n’était pas un cas de coopération pacifique. Napoléon a forcé la main du sultan avec une démonstration de force brutale, à lirritation de la Grande-Bretagne et à la rage absolue de Nicolas Ier. Lintendance des lieux saints était depuis longtemps un impératif politique russe. Serf et Tsar périraient volontiers pour conserver ce privilège. Pour Napoléon III, revendiquer lintendance était en grande partie superficiel. Sa motivation première était de se faire plaisir avec les catholiques français influents. Cela assurerait une majorité malgré la révocation de son parlement. Les motivations non spirituelles de Napoléon ont exaspéré le véritablement pieux Nicolas Ier, qui était plus que disposé à faire la guerre pour assurer la tutelle. Napoléon III, moins. Au contraire, Napoléon III a déclaré la guerre pour des raisons géopolitiques. Comme la Grande-Bretagne, la France craignait que la Russie ne se précipite pour combler le vide dun Empire ottoman qui implosait. Cela perturberait léquilibre européen des pouvoirs. En un mot, les lieux saints sont devenus le symbole dun fossé encore plus grand. Napoléon III ne s’est pas battu pour Dieu, mais pour le pouvoir. La scène semblait prête pour une escarmouche.

Pourtant, lamadou de Crimée était têtu pour senflammer. La proclamation de la souveraineté par la France n’était en aucun cas définitive et restait pacifiquement réversible. Sil nest pas réversible, un compromis pourrait être atteint. Cest-à-dire que lescalade du conflit nétait pas nécessaire. Il faudrait une série de bévues diplomatiques spectaculaires pour laggraver. Malheureusement, de telles erreurs ont été facilement fournies par Nicolas Ier et son émissaire notoire, Menchikov.

La première erreur de Nicolas a été d’exclure la possibilité d’une alliance avec la Grande-Bretagne. Il a fait cela en mal interprétant la position de la Grande-Bretagne dans le conflit. Nicolas avait décidé quil avait affaire à une puissance fondamentalement anti-française. Par extension, Nicolas présumait quil avait affaire à une puissance pro-russe. Ce n’était pas totalement infondé. Lors de sa visite à Londres en 1844, Nicolas Ier avait rencontré le comte dAberdeen. À lépoque, Aberdeen était manifestement anti-française et amicale envers la Russie. Quand Aberdeen est devenu Premier ministre, Nicholas I était ravi – pour une bonne cause. Bientôt, Nicolas comptait sur Aberdeen pour poursuivre la politique anti-française quil avait préconisée en 1844. Malheureusement pour Nicolas Ier, Aberdeen représentait un cabinet très divisé. Puisquil était divisé en une faction pro-française et pro-russe, elle ne pouvait pas obtenir un soutien suffisant pour sa politique. Au fur et à mesure que la Grande-Bretagne séloignait de la Russie, Nicolas devenait plus ferme dans sa conviction quune telle séparation nexistait pas. Convaincu que la Grande-Bretagne approuvait sa cause, Nicolas Ier croyait à tort quil pouvait être encore plus autoritaire que ne létait sa coutume. Nicolas Ier a mis en œuvre son «autoritarisme en toute impunité» dans ses relations avec la Porte, terrorisant essentiellement le sultan en renversant le traité français de tutelle. Pendant tout ce temps, il a assumé le soutien de la Grande-Bretagne. Nesselrode, le diplomate vedette de Nicholas, a déclaré à Nicholas que de telles suppositions pourraient être fatales. Il a souligné que la Grande-Bretagne ne sengagerait jamais dans des décisions politiques inflexibles. Il a informé Nicolas Ier que la Grande-Bretagne était une puissance réactive dans ses actions. Il a poursuivi en disant à Nicholas que le parlement britannique reculerait devant un engagement inconditionnel envers la Russie.

Nicolas aurait bien fait en écoutant Nesselrode. Diplomate très habile, Nesselrode a montré des capacités de pronostic presque tocquevilliennes. Il a prédit que la Russie «affronterait le monde entier seule sans alliés». Ceci est devenu, bien sûr, la caractéristique distinctive de la guerre de Crimée dans son ensemble.

En résumé, le jugement de Nicolas nétait pas à la hauteur de ses diplomates. Cependant, Nicolas pouvait faire des erreurs de jugement dans sa foulée; après tout, il croyait que la Grande-Bretagne le soutiendrait si les choses tournaient mal.

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